Mardi 17 juillet 2007 à 3:38

Règle numéro un : on ne ne compte que sur soi-même.
Règle numéro deux : on n'implique les autres que le minimum nécessaire.
Règle numéro trois : ne jamais avoir du sang innocent sur ses mains. Tuer mais pas assassiner.
Règle numéro quatre : ne pas trahir quelqu'un tant qu'il n'ait pas donné une bonne raison de le faire.


C'est en suivant ces règles, qui constituent mon code de conduite, que j'étais là. Ouais, là. Avachi sur une chaise, les pieds sur le bureau, en train de griller une cigarette à la chlorophile. La flemme qui m'envahissait lentement. Et puis la vitre devant moi. La grande vitre. Les portes-vitres. Et les flics, et les forces spéciales, et toutes les conneries. Les journalistes, les commères, les bouffons et tout le bordel qui arrive dans ce genre de cas. Et puis, ma jolie M4 aussi. Classique, diront certains. Ouais, ben moins qu'une AK-47 ou qu'une AK-74. Et puis on s'en fout, après tout, une balle reste une balle, qu'elle provienne d'un chargeur russe ou d'un canon américain : un morceau de plomb qui va se tailler la part du lion dans ce qu'il touche, avec une méprise sans nom pour le mal qu'on se donne à entretenir nos organes.
Je suis prêt à parier gros, vraiment gros, que les otages en bas pensent la même chose. La moitié d'entre eux pensent probablement qu'on va les descendre. Les otages sont toujours comme ça. Toujours peur. Ils pourraient avoir un type inoffensif en face qu'ils ne s'en rendraient pas compte. Ceci dit, n'importe quel type inoffensif devient dangereux avec un flingue dans les mains, pour peu que la sécurité ai été enlevée. Donc, en un sens, ils avaient pas tort.
En un autre sens, ils avaient tort. D'abord parce que je suis pas un sadique qui tape pour le plaisir. Ensuite car ils possédaient un certain pourcentage de chance de contracter le syndrôme de Stockholm, ce qui m'arrangerait en partie. Et ce qui arrangerait pas les autres abrutis, occupés à faire leur bordel.
"Le plan Ultime". Ultime à défaut de parfait, évidemment, rien n'est jamais parfait. Il y a toujours une faiblesse quelque part. Une défaillance. Pas dans ce plan là. A moins qu'elle soit, bien entendu, humaine. On n'est jamais à l'abri de ce genre de conneries. C'est exactement pour cette raison que je fumait tranquillement ma clope en me concentrant pour ne pas me relâcher. Pour ne pas être la défaillance. Les autres ne failliraient pas, je pense.
C'était le rassemblement des tarés. Un vrai "freak show", comme on dit en anglais. On avait tout ce qu'il fallait pour un producteur de film, vraiment. Le taré en explosifs, le militaire qui attends que l'occasion de faire usage de son arme, le cerveau qui donnait les ordres... Et puis moi, le mercenaire baroudeur blasé. La totale.
Les forces spéciales crève d'envie d'entrer, je vois ça d'ici. Je parie que nos amis les journalistes, les obsédés de l'information, doivent inventer une bonne grosse connerie pour qualifier ce qu'on fait ici.
D'ici ce soir on aura un joli titre ronflant sur les innombrables journaux. On va être (encore) à la une. Ca va, on s'ennuit pas trop en compagnie des autres bouffons, là.
Je vois ça d'ici, attendez voir... "Prise d'otages : situation inconnue " "Que va-t-il advenir des otages ?" Blablabla... Mais réfléchissez un peu tas de cons, les otages, on va pas les violer ou quoique ce soit, bordel... Enfin, tant qu'ils nous font pas chier...
- Comment ça va, concierge ?
- Ca roule ma poule.
Liam. Un irlandais complètement dingue, mais sympathique. Un petit gars qui tenait pas en place. On a toujours tendance à traiter les autres de fous avant d'apprendre à les connaître. Certes, Liam se serait fait sauter une bonne demi-douzaine de fois si on avait pas l'oeil alerte. Mais c'était un bon bougre et il aimait plus ses explosifs que faire du mal aux gens.
- Tu penses que les volatiles vont nous rendre visite ce soir ? demanda-t-il.
- Non... Au besoin, je les plumerai avec ceci, dis-je en brandissant ma M4.
- Ok, te branle pas trop pendant que je vais jetter un oeil sur nos minettes.
- T'inquiète pas. Je connais mon job.
- Ouais ouais...
On connaissait chacun notre job. On était des pros. Des vrais pros de notre spécialité. Comme toujours dans ce genre d'histoire, quoi. On maîtrisait totalement la situation, les poulets patinaient à mort. Notre cerveau avait déjà embobiné le type chargé de négocier avec nous. Comme d'hab. Je travaillais  avec cette bande de zozos depuis pas longtemps mais ils étaient sympathiques, et faisaient le job proprement. Tout ce que je demandais en somme. On étaient vachement bien, dans cet endroit. Salement décoré, comme toujours. Les banquiers ont toujours eu mauvais goût, selon moi. Elle était bien cette banque. Un véritable bastion. Une forteresse. L'enfer tactique. Je m'explique.
Une entrée, trois doubles portes en verre qui donnent directement sur des escaliers. Donc déjà on sait que l'ennemi arrive et il est toujours plus dur de grimper un escalier que de courir sur du plat. Ensuite, un joli hall de réception avec des guichets, c'est là où je me trouve. Pratique parce qu'on peut canarder l'ennemi juste assez longtemps pour le retarder. En plus, ils arrivent droit devant vous au compte goutte. Pan pan pan pan. Je vois ça très bien, j'ai une bonne imagination. Et j'suis un bon tireur, aussi. Je me faisais limite chier, là, dans le hall, tout seul avec ma clope.
- Dickhead ?
- What's up, cocksucker ?
Un seul type pouvait me parler comme ça : Boris. C'était obligé : il fallait qu'on ai un bourrin russe nommé Boris. Obligatoire. Je l'ai aimé au premier coup d'oeil celui là. Vous prenez une armoire à glace vous lui mettez une tête, un treillis et une arme dans les mains : Boris. Il avait l'air méchant comme ça, mais c'était une tendresse avec les gosses. Les femmes c'était pas son truc, par contre. Il savait comment elles fonctionnaient et ça avait l'air de lui suffir amplement. Il prit un siège, le souleva d'une main et le posa à côté du mien, avant de s'avachir dessus tout comme moi. Tout ceci sans lâcher son arme, bien entendu. Boris sans arme dans les mains ça semblait relativement impossible. Que ce soit un couteau, un flingue, un fusil, une carabine, un taser, un bazooka ou une mitrailleuse, il fallait qu'il ai un joujou en main.
- Tu te fais pas un peu chier, là, tout seul ?
- Sisi, d'ailleurs je te remercie de venir me tenir compagnie, on va pouvoir se tirer dessus pour s'occuper.
- Bien sûr...
Bien que nous soyons d'origines différentes, nous tous, nous parlions tous un anglais remarquable, car dénué de tout accent pouvant indiquer notre provenance. C'était convivial, ici, en plein milieu d'un braquage avec prises d'otages. Non, moi je me sentais bien. J'avais faim. Boris me tendit un sandwich, et engloutit un autre. Je savais pas trop ce que notre cervelle nationale allait nous faire faire par la suite, mais j'étais sûr qu'on s'amuserait beaucoup.

Par MavangElle le Mercredi 25 juillet 2007 à 1:00
Joli début d'histoire. Ca change un peu du pseudo romantisme de fond avec des héros chevaleresques et des filles à la cervelle d'huître. Vivement la suite. Ca donne envie de revenir pour lire le reste.

[ And that's all ? ]
 

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