Vendredi 27 juillet 2007 à 4:39

- Désolé, j'espère qu'il ne t'a pas fait trop mal.
- N... Non, ça va.

Je lui tendit une main et l'aidait à se relever. Elle remit de l'ordre dans ses cheveux blonds cendrés complètement ébouriffés, puis elle s'assit sur le balcon, les genoux contre la poitrine. Je la devinais qui sanglotait silencieusement. Après avoir remis un peu d'ordre dans l'appartement et éteint quelques lumières, j'ai attrapé une couverture et je suis allé m'asseoir à côté d'elle.

- Tu veux une couverture ?
- Pardon ? Oh... Je...

Sans attendre qu'elle ai finit de répondre, je lui ai lancé ladite couverture sur les épaules, puis j'ai refermé la porte et je l'ai regardé. Elle continuait de pleurer doucement, ses larmes étant visibles à la lumière de la lune. On avait la chance d'avoir un ciel exceptionnellement clair cette nuit là.  De plus, l'appartement était au dixième étage et proche d'un parc, ce qui nous épargnait la lumière jaune et vieillote des lampadères. On distinguait très nettement les étoiles et c'était beau. Je n'étais pas frileux, la petite brise qui soufflait très doucement ne contribuait donc qu'à me rafraîchir et à caresser mon visage. Si je n'avais pas senti que la situation était aussi grave, je crois que je n'aurai pas parlé avant un moment, pour profitant de l'instant qui s'avérait délectable.

- Ca va mieux ?
- Je... Je ne sais pas...

Elle était encore sous le choc. Elle. Kim. Une jeune fille avec de grands yeux bleus, des cheveux blonds cendrés, et un sourire espiègle. Certains la trouvaient directement sortie d'une bande dessinée ou d'un manga quelconque. Elle était suffisamment belle pour faire mannequin, mais je crois qu'elle était simplement trop intelligente pour ça. Trop aimante peut-être. Je crois que lui demander d'arrêter de sourire aurait été stupide. Cette jeune fille était selon moi la joie incarnée, la preuve vivante que l'on pouvait être heureux dans sa vie, même avec des tuiles quotidiennes. Soit on la croyait stupide, soit on s'apercevait de sa gentilesse naturelle. Ca lui était indifférent et ça lui permettait d'apporter le sourire partout où elle allait. Et c'est comme ça qu'on l'avait rencontré, les copains et moi. C'est comme ça qu'Elian en était tombé immédiatement amoureux. Et je pense qu'elle le savait depuis le début, qu'il l'aimait. Moi aussi je l'aimais bien, mais plus comme une amie. Ou peut être que j'avais simplement cette sensation que l'on a lorsqu'on est face à une personne très enfantine, cette sensation de devoir paternel pour quelqu'un qui est parfois à peine moins âgé que nous. Et il faut quand même noter que cet être habituellement habité par la joie et la bonne humeur pleurait à moins de cinquante centimètres de moi.

- Tu veux que j'aille te chercher un peu d'eau peut-être ?
- Non ! Non... Ca... Ca va aller.

Elle avait beau dire ça, elle continuait de pleurer. Pas comme une madeleine, non. Elle pleurait silencieusement, les larmes descendant très doucement le long de ses joues pour chuter jusqu'à son ventre, si elles ne s'étaient pas déjà écrasées sur ses genoux. Et elle fixait un point au loin, laissant son visage illuminé par la lumière blafarde de la lune. C'était de la faute de Loan, tout ça. Lui et Elian s'étaient disputés excessivement fort, pour un sujet vraiment minable. Débile, même. Mais entre eux deux tout à tendance à finir en réglement de comptes, comme si tout était -selon leurs propres dires- une "question d'honneur". Quelle bande d'abrutis. C'était Elian l'amoureux, pas moi, bordel ! Et pourtant c'est moi qui était assis là, à consoler Kim car ils avaient sacagé l'appartement - et elle avec. La simple idée que l'on puisse faire du mal à cette personne auraît dû stopper net l'un et l'autre, ou, tout du moins, Elian, car Loan a tendance à haïr à peu près tout le monde. Et pourtant non. Si je n'étais pas intervenu pour faire tampon en mettant l'un et l'autre hors-jeu, le résultat aurait été vraiment effrayant je pense. Heureusement, j'étais intervenu à temps.

- Est... ce que ça lui arrive... souvent ?

Qui donc ? Oh. Elian, évidemment.

- Si tu parles de se prendre la tête comme un abruti avec Loan, oui, ça leur arrive vraiment souvent. Après, ils ne se mettent pas toujours dans ces états.
- Et toi ?

Attention, danger en vue, question personnelle imminente.

- Moi quoi ?
- Ca t'arrive de... eh bien...

Qu'est-ce que je disais...

- Si ça m'arrive de m'énerver avec les deux bachi-bouzouks qui me tiennent lieu de copains ?

Elle étouffa un petit rire qui pouvait sans consteste être qualifié de "mignon". Et dire que c'est un mec qui emploie ce mot. En tout cas, j'avais réussi : elle avait sourit. C'est dingue comme parfois le sourire peut éclairer le visage de quelqu'un. Même avec des larmes sur les joues.

- Moi je ne suis là que pour séparer ces deux énergumènes. Je préfère être un tampon, et de toute façon ils ne me demandent pas mon avis. En un sens ça m'arrange, ça m'évite d'être impliqué dans trop de choses. Quand des conneries arrivent, c'est donc de leur faute.

En disant ça je n'ai pu m'empêcher d'esquisser un petit sourire. C'était la vérité. J'étais celui dont on se souciait le moins - et je ne faisait rien pour que ça change. Ca me permettait d'être peinard dans mon coin et d'être quasiment irréprochable. Loan prenait un grand paquet de décisions, Elian se contentait juste de les contester : la plupart du temps, il n'avait pas de meilleure idée. Quelque part, cette organisation me donnait l'air d'être beaucoup plus intelligent que ces deux crétins. D'autant que je ne les aimais pas à la folie, c'était juste des "copains", voir même des "camarades". Malgré tout on avait eu notre lot de bons moments. Mais depuis qu'Elian était tombé amoureux de cette fille, les choses n'avait fait qu'empirer, et ils s'étaient énervés de plus en plus souvent, au point que je finissais parfois par les laisser se taper dessus. Mais là ils avaient dépassés les bornes.

- Je suppose que je doit te remercier de... les avoir séparés ?
- Tu fais ce que tu veux.

Elle hocha doucement la tête. Je crois qu'elle avait arrêté de pleurer. Elle commença à se balancer doucement d'avant en arrière. Je dois avouer que je ne savais pas trop où me mettre, parce que même si je n'ai jamais ressenti d'amour "amoureux" pour elle, c'était troublant de la savoir juste à côté de moi. C'est pourquoi j'ai jugé intelligent de ne rien changer par rapport à mon comportement habituel, advienne que pourra.

- Ethan ?
 
Elle m'appelle par mon prénom. Pourquoi le voyant "Danger" clignote en rouge pétant au fin fond de mon crâne ? Aïe aïe aïe...

- Quoi ?

C'était vraiment une épreuve de ne pas tourner le regard vers elle, mais je savais que dans mon intérêt personnel il valait mieux que j'évite.

- Est-ce que ça te dérange si je me mets comme ça ?

Elle inclina doucement la tête sur mon épaule.
Oui, ça me dérange.

- Non, pas du tout.

Joie. Quel perfection dans le synchronisme de mes paroles et de mes pensées. Je suppose que c'est toujours comme ça, évidemment. Mais merde, quoi, c'était Elian l'amoureux, pas moi ! En tout cas, cette version là m'allait mieux que celle que je vivais maintenant. Ca serait la guerre si Kim finissait dans mes bras, le genre de guerre que je gagnerai uniquement en massacrant Elian, et Loan au passage (qui lui viendrait juste pour le plaisir de cogner sur quelque chose). On en revient à l'éternelle question : la fille de votre coeur vaut-elle mieux que vos amis, eh ? Mais c'est quoi ce bordel, là, stop ! Stop ! Je veux revenir en arrière, là, stop ! Où est la télécommande pour gérer la vie, là ? Stop j'ai dis !

- Ethan...

Putain merde fais chier. Elle s'était endormie et venait de glisser sur moi. Alors, je vais profiter de ceci pour faire l'inventaire des emmerdes qui vont arriver au grand galop avec autant de grace qu'un éléphant dans un magasin de porcelaine : Un, je ne vais pas oser bouger jusqu'à son réveil. Deux, une fois qu'elle sera réveillé je ne saurais pas quoi lui dire. Trois, Elian va vouloir ma peau. Quatre, Loan aussi. Cinq, ça va très mal se terminer tout ça. Six, je croyais avoir un sentiment de paternalisme pour elle, mais apparemment l'introspection est à refaire. Sept, elle n'avait aucune idée des dégâts qu'elle venait de causer, et de la catastrophe qui allait en découler. Elle ne pouvait pas imaginer combien cette guerre entre nous trois allait être destructrice, violente et omniprésente. Et elle souffrirait tout autant que moi des retombées... Mais je ne les laisserais pas lui faire du mal, ça non.

Elle n'avait pas idée à quel point c'est dur de gérer un seul corps pour trois personnes différentes.

Par MavangElle le Vendredi 3 août 2007 à 22:52
J'aime tes histoires. Vraiment. Elles me divertissent comme peu de choses. Et ça fait du bien.
J'en veux d'autres. Exigeante ? Sans doute. Mais je sais que ça viendra... Peut-être ? De toute façon, je lirai. Encore et encore.
D'avance merci. Puisque ce n'est pas pour moi.
Par Rosae le Samedi 4 août 2007 à 16:37
Cette histoire a une suite ou pas ? Parce que l'histoire a l'air intéressante :)
Tu pourrais en faire une fiction de quelques chapitres ^^
Par lagrandemymy le Vendredi 10 août 2007 à 20:48
J'ai jamais compris pourquoi tu restais à lire mon blog. Jamais. Et je me suis rendue qu'en fait je n'avais jamais non plus lu attentivement le tien. Y'a comme une sonnerie du type "Fatal error" que le PC gueule une dernière fois avant de rendre l'âme dans ma tête. On ne m'y reprendra plus. Et j'aime énormément ce texte.
Par mise.a.nue le Samedi 11 août 2007 à 12:33
Je suis tout à fait d'accord avec les deux commentaires précédents...
Magnifique texte.
J'avoue qu'au début j'ai vu ça et je me suis dis... Pfiu, la flemme xD [ Et c'est moi qui dit ça ^^' ]
Et puis j'ai laissé mes yeux s'accrocher aux mots et.. Woua. T'écris vraiment bien.
Par Apfel le Jeudi 13 septembre 2007 à 22:22
Oui ! [je pense que tu as compris à peu près le pseudo sens de ce mot -et non concept, ahaha- que je viens de déposer niaisement.
Oui, oui, oui. Chute. Oui. Chute. [Marie, la ferme. Chut.]
Il s'agit de lire, sans jamais savoir à quoi s'attendre. C'est comme une aventure, en quelque sorte, de laquelle on sort les yeux brillants et le coeur battant.
Oui !

PS: Oui, c'est nul comme commentaire, j'espère que tu m'auras comprise. Sinon... Hum... Je ne sais trop.
Par MavangElle le Dimanche 4 novembre 2007 à 14:47
La première nouvelle que j'ai lu de toi. Par hasard. Je me rappelle mon étonnement : cela faisait longtemps que je n'avais pas découvert une histoire entraînante. Je la trouve plus douce que les autres. J'éprouve une sorte de tendresse pour elle, comme une personne aimée et surveillée de loin.

Tu ne trouves pas que je raconte de la merde quand je parle sérieusement ?
Par Apfel le Jeudi 21 février 2008 à 23:13
Juste relire, et continuer d'avoir cette boule, à la fin.
On ne se lasse pas. Je ne me lasse pas.
 

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